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Actualité - Divers - Droit du travail - Publiée le 15 janvier 2023
Par une décision du 23 novembre 2022, la Cour de cassation a tranché la question de savoir si un salarié étranger, mis à pied puis licencié en raison de sa situation administrative irrégulière, pouvait ou non prétendre au versement de sa rémunération pour la période de mise à pied ?
Soc. 23 novembre 2022, pourvoi n°21-12.125, FS-B
Par une décision du 23 novembre 2022, la Cour de cassation a tranché la question de savoir si un salarié étranger, mis à pied puis licencié en raison de sa situation administrative irrégulière, pouvait ou non prétendre au versement de sa rémunération pour la période de mise à pied ?
Les faits ayant donné lieu à cette décision du 23 novembre 2022 étaient les suivants :
Un employeur se rend compte que son salarié étranger (n’ayant pas la nationalité d’un Etat membre de l’Union européenne, ni d’un Etat partie à l’Espace économique européen, ni de la Confédération Suisse) ne dispose pas de titre de séjour lui permettant de résider et d’exercer légalement une activité salariée sur le territoire français.
L’employeur se voit ainsi obligé de mettre fin à la relation de travail sous-peine de se retrouver lui-même dans une situation d’illégalité vis-à-vis des règles relatives à l’embauche de travailleurs étrangers et de risquer des pénalités financières en cas de contrôle (OFII, URSSAF…).
Après avoir notifié au salarié concerné une mise à pied à titre conservatoire, l’employeur le convoque à un entretien préalable à licenciement, puis le licencie au motif qu’il ne détient pas de titre de séjour.
Le salarié saisit alors le conseil de prud’hommes pour demander à ce que le salaire qu’il n’a pas perçu pendant sa mise à pied lui soit versé.
Echouant à en obtenir le paiement en première instance et en appel, l’intéressé porte l’affaire devant la Cour de cassation.
Saisie de la question, la Haute juridiction rappelle d’abord que la situation irrégulière dans laquelle se trouve un travailleur étranger constitue nécessairement une cause objective de licenciement, par combinaison des articles L. 8252-1 et L.8252-2 1° du code de travail. Cependant, il ne s’agit pas d’une cause de licenciement pour faute grave.
Dans cette affaire, la lettre de licenciement ne mentionnait d’ailleurs aucune faute grave mais bien le défaut de titre de séjour.
Or, il est acté de longue date que seule la faute grave ou la faute lourde peuvent justifier le non-paiement du salaire pendant la mise à pied (Cass. soc., 26 novembre 1987, n°85-40.367).
Ne pouvant invoquer la faute grave du fait de la seule irrégularité de l’emploi pour défaut de titre de séjour, l’employeur ne pouvait donc s’abstenir le rémunérer son salarié pendant sa mise à pied.
La chambre sociale de la Cour de cassation a ainsi censuré la décision de la cour d’appel et considéré que le salarié pouvait bien prétendre, dans cette situation, au paiement de la période de mise à pied.
La solution est classique s’agissant de la règle relative au paiement de la mise à pied conservatoire ne débouchant pas sur un licenciement pour faute grave.
Néanmoins, la Cour de cassation apporte, par cette décision, une précision en soulignant que l’employeur qui souhaiterait invoquer une faute grave, nécessairement distincte de la seule irrégularité de l’emploi, doit le préciser dans la lettre de licenciement pour justifier le non-paiement du salaire pendant la mise à pied.
Loïs SOURDAIN – Juriste
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